Une salle d'exposition
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« Goose Village » ressuscité à la Maison de la culture Marie-Uguay dans Le Sud-Ouest

Chronique des vies déplacées et du patrimoine perdu, l’exposition « Goose Village » se pose dans Le Sud-Ouest pour l’été. Du 15 juin au 31 août, le spectre de cet arrondissement disparu depuis six décennies est ressuscité sur la rue Monk, précisément à la Maison de la culture Marie-Uguay.

Dans l’exposition de Marisa Portolese, il émane une douleur comme celle d’une injustice non réparée, et une blessure non cicatrisée. On y perçoit un cri contre l’oubli et la volonté cathartique d’un récit raconté à travers des pages d’une histoire recomposée, celle du Goose Village, le village-aux-Oies.

Autrefois situé entre le pont Victoria et le canal de Lachine, du côté sud de Pointe-Saint-Charles, ce village se conjugue aujourd’hui au passé, parce que il a été rasé en raison d’une décision administrative. « Goose Village, autrefois une communauté prospère, est devenu un stationnement et a disparu des cartes de Montréal, effaçant certains groupes ethniques du tissu culturel et social de ce site sous-évalué. », nous dit l’artiste avec une pointe d’amertume.

Il était une fois…

En 1964, en vue d’Expo 67, l’administration municipale décide de démolir Goose Village pour construire sur le même site l’Autostade. 350 immeubles seront rasés et 1500 familles expropriées et délogées.

Dans le livre accompagnant l’exposition, Marisa Portolese écrit : « Malheureusement, comme c’est souvent le cas en développement urbain et en période de modernisation, les voix et les opinions des résidents et résidentes ne furent pas entendues ou respectées durant le processus décisionnaire. » La dimension absurde de l’épisode atteint son comble quand « ajoutant l’insulte à l’injure, l’Autostade a connu la décadence moins de dix ans plus tard et fut démoli en 1976. »

Goose Village – crédit photo : Archives de la Ville de Montréal

Dans cette exposition, Mme Portolese a fait de l’archéologie pour réussir son pari. Il a fallu gratter dans les couches ingrates du siècle dernier pour éclairer cet épisode de suppression d’un lieu de vie et redonner une voix et un visage à une communauté montréalaise.

Les planches racontent de façon chronologique la naissance, l’évolution et la mort de Goose Village, soit un peu plus d’un siècle d’histoire et de vie dans les six rues qui composaient ce village d’ouvriers, issus essentiellement de l’immigration.

À travers un prisme autobiographique

Mme Portolese est descendante de 2e génération d’immigrantes et d’immigrants italiens. Sa propre famille a subi l’expulsion du Goose Village. Le prisme autobiographique marque son récit.

Née à Montréal, Marisa Portolese est professeure agrégée de la Faculté des Beaux-Arts de l’Université Concordia. Ses œuvres, saluées par la critique et largement diffusées, explorent, selon sa biographie officielle, « des facettes des expériences humaines en relation avec les environnements psychologiques et physiques, liées à des thèmes plus larges concernant l’identité et le public. »

À la question de savoir pourquoi est-ce nécessaire de réaliser et d’exposer ce travail historique, elle explique que « Goose Village montre comment de mauvaises décisions d’urbanisme affectent négativement et déplacent les communautés de la classe ouvrière. L’objectif est de mettre en évidence les conséquences destructrices d’événements marquants et de commémorer les souvenirs des villageois à travers une perspective autobiographique et empathique. »

Mémoire collective

Le village évaporé et sa toponymie effacée, on y trouve à la place aujourd’hui un terrain vague. Marisa Portolese refuse une deuxième mort du village et souligne l’importance de préserver les récits culturels au sein de la mosaïque canadienne en capturant la mémoire collective et le patrimoine ethnique de la communauté.

Ancien habitant de Goose Village, Domenico Portolese, père de Marisa, se tient là où se trouvait son quartier – crédit photo : Marisa Portolese

« Mon message s’adresse à tous. Le paysage culturel du Canada et du Québec se caractérise par sa diversité et sa richesse, reflétant l’interaction complexe des histoires, des identités et des paysages à travers la nation et la province », dit-elle.

« Je pense qu’il est important de transmettre une partie de l’histoire qui reste relativement inconnue. Goose Village est un rappel poignant des récits culturels qui restent souvent cachés ou marginalisés. L’examen de ce projet nous permet de mieux comprendre la résilience des communautés immigrées et l’évolution des paysages urbains qui façonnent la société canadienne contemporaine », conclut-elle.

La photo en haut de cet article de l’exposition a été prise par Nouri Nesrouche.

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Nouri Nesrouche
Nouri Nesrouche pratique le journalisme depuis 23 ans. Après avoir travaillé pour deux grands titres francophones en Algérie, il a intégré la rédaction de Nouvelles d’ici en juin 2024. Durant sa carrière, Nouri a produit de grands reportages, notamment à l’étranger, des chroniques politiques, et beaucoup d’informations de proximité. En plus de la politique et des affaires civiques, il s’intéresse beaucoup à la culture.