Si la broderie vous évoque une pratique surannée, c’est que vous ne connaissez pas encore Brodé Serré. Grâce à son concept moderne, la Verdunoise Marianne Côté-Lecavalier réinvente la broderie et crée à l’aide de fils et d’aiguilles de véritables œuvres d’art, parsemées de tableaux floraux, et autres formules passives-agressives en vogue. Ses kits labellisés Brodé Serré se vendent comme des petits pains et son compte Instagram comptabilise plus de 16 000 abonnés, de quoi faire rougir d’envie la mamie du quartier. À Verdun où elle a installé son atelier de création, l’artiste-entrepreneure a pignon sur rue.
Amoureuse de Verdun
À quelques pas de la promenade des berges de Verdun, cette dernière s’est aménagé un espace de créativité digne d’une page de magazine. Ce matin encore, la lumière douce du soleil pénètre par les fenêtres ornées de voilages légers, et se plonge dans les reliefs de son bureau.
L’appartement où elle vit en couple lui sert aussi d’atelier, mais n’allez pas vite en jugement, car il y a de quoi tomber de jalousie. Dans ce sanctuaire, où l’odeur du thé vert flotte comme un nuage de sérénité, la jeune artiste a su trouver la formule alchimique entre le calme yogique et sa folie brodeuse.
Cet environnement chaleureux, décoré avec goût et organisé avec soin, reflète sa passion pour la broderie moderne et son engagement envers une esthétique minimaliste et apaisante. En plus, la proximité du bord de l’eau est un privilège inespéré, devenu vite un élément de la vie et de l’ouvrage de la brodeuse.
Marianne Côté-Lecavalier réside à Verdun depuis quatre ans. Avant, cette fille originaire de Châteauguay avait hâte de quitter Montréal pour retrouver la tranquillité et la proximité de la nature. « Je ne connaissais pas vraiment le coin, mais quand on est arrivé ici, j’ai découvert qu’on avait ces berges paradisiaques. J’étais tellement heureuse d’avoir signé mon bail », confie-t-elle.
Très vite, ce cadre va devenir un élément central dans sa vie pour ce qu’il apporte comme zénitude et inspiration dans son art.
Un bel accident
Qui ne rêve pas de faire de son passe-temps sa principale source de revenus ? Pour Mme Côté-Lecavalier, ce rêve est une réalité. Au lendemain de son installation à Verdun, elle commence à donner des cours dans l’arrière-boutique du magasin Brock Art sur la rue Wellington, et c’est là qu’elle voit clairement ce qu’elle veut faire.
Brodé Serré, qui n’était jusque-là qu’une page Instagram, se transforme alors en une entreprise qui lui permet de vendre des kits de broderie et d’animer une grande communauté autour de cours de broderie moderne.
« Ce n’était pas prévu, c’est juste un bel accident », confie-t-elle. Mais un bel accident qui, en tout cas, fait beaucoup d’heureuses, et d’heureux aussi, car les hommes ne sont pas à l’abri de la piqûre brodeuse grâce au concept moderne de l’artiste de Verdun et la philosophie zen qu’elle répand.
Arrêter le temps
Cette dernière ne manque pas de souligner les bienfaits de la broderie sur la santé mentale. « Comme toute ma génération, j’étais très anxieuse par rapport à ce que j’allais faire dans la vie, et je n’avais pas envie d’avoir une job qui va très, très vite », raconte-t-elle. Une chance inouïe, son passe-temps est devenu son travail, et elle en est reconnaissante.
La broderie la mène aussi vers la méditation, et lui procure cette deuxième source de satisfaction. Décrocher du quotidien pour échapper à la voie rapide sociale, la recette fait des émules et le « crochet time » se vend bien.
Aujourd’hui, la plus grande raison pour laquelle les gens veulent des passe-temps comme la broderie, c’est justement pour arrêter le temps, affirme-t-elle.
Des dessins bien inspirés
C’est dans la vraie vie que Marianne Côté-Lecavalier puise l’inspiration pour ses dessins. Rien de négatif cependant. Cliché ou pas, elle est fascinée par la nature et lui emprunte beaucoup en revisitant des thèmes de la flore et la faune à travers ses dessins. Mais le dessin est aussi un moyen de canaliser ses émotions et elle s’en sert librement pour se défouler sans avoir à crier.
Mme Côté-Lecavalier se transforme aussi en narratrice mordante avec ses œuvres brodées imprégnées d’une bonne dose d’ironie.
Petite remarque passive-agressive à l’endroit des propriétaires : « Home sweet home … Ptit 3½ crissement trop cher », ou clin d’œil contre l’hiver qui s’allonge : « Ho Ho Hosti… que j’ai hâte à l’été ». C’est mordant à souhait !
Ces petites touches ajoutent un charme à la fois décalé et rafraîchissant à son travail, prouvant qu’un petit épineux peut se cacher sous un doux pétale.
L’art de Marianne Côté-Lecavalier tisse un pont entre tradition et modernité, et invite à contempler le monde avec un regard nouveau. Dans son cocon créatif, elle incarne l’essence même de la broderie moderne : une quête d’authenticité, un retour aux sources, tout en affirmant, avec humour, les aléas de l’existence.
La photo d’ouverture a été prise par Nouri Nesrouche.
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