Consultation publique sur l’itinérance à Montréal : une approche différente, mais une participation encore à améliorer

Comment accueillir et accompagner les personnes en situation d’itinérance au cœur de quartiers dans lesquels la cohabitation harmonieuse avec la population peut devenir un enjeu ?
L’Office de la consultation publique de Montréal (OCPM) mène actuellement une consultation visant à fournir des recommandations à la Ville de Montréal. C’est dans ce cadre que s’est tenue une séance de conversation citoyenne, sous forme d’un jeu de rôle, au Centre culturel Georges-Vanier dans Le Sud-Ouest le 16 janvier. 

Le comité exécutif de la Ville de Montréal a confié à l’OCPM, le 8 juillet 2024, le mandat de consulter la population sur « les conditions de succès afin d’assurer la cohabitation sociale et une intégration harmonieuse des ressources pour les personnes en situation d’itinérance dans les quartiers de la métropole ».

Une consultation attendue par le public et le politique

Le contexte est sensible. Au printemps 2024, un bâtiment d’aide aux personnes itinérantes, avec un centre d’injection supervisée, ouvre dans le quartier Saint-Henri du Sud-Ouest. La Maison Benoît-Labre n’est pas sans susciter de vives critiques : elle est proche d’une école primaire.

Ce n’est pas le seul cas. À Verdun, l’annonce de l’ouverture en décembre 2023 d’un refuge temporaire aux Jardins Gordon  a résulté en une salle de conseil d’arrondissement pleine à craquer lors de la séance d’information à la période de questions particulièrement animée.

Lors d’une entrevue à l’automne 2024 avec Nouvelles d’Ici, le maire du Sud-Ouest, Benoit Dorais, a indiqué que la consultation de l’OCPM sur la question sera majeure pour l’arrondissement. L’élu, également vice-président du comité exécutif, a avancé que le plus grand défi des prochaines années pour Le Sud-Ouest sera « une crise des vulnérabilités ». 

« Des stratégies visant à favoriser la communication et la cohabitation sociale seront mises en œuvre, dans la foulée de la consultation de l’OCPM en cours portant sur les conditions gagnantes de l’intégration des ressources dans les quartiers », indique un communiqué de la Ville de Montréal datant du 15 janvier. Il recense les initiatives de la mairesse sortante, Valérie Plante, d’ici la fin de son mandat. 

Avant de débuter la consultation publique en décembre, les commissaires de l’OCPM ont procédé durant trois mois à des rencontres plus ciblées. Entrevues avec la Société de transport de Montréal (STM), le Service de Police de la Ville de Montréal (SPVM) ou avec des organismes communautaires, mais aussi du démarchage dans plusieurs lieux publics: une large récolte d’informations a précédé trois conversations citoyennes à Ahuntsic, à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et dans Le Sud-Ouest.

Innover pour mieux consulter le public et le milieu sur les enjeux de cohabitation avec la réalité de l’itinérance ?

La démarche de cette consultation publique comporte sa part d’expérimentation et de leçons, estime le président de l’OCPM, Philippe Bourke, mais elle est nécessaire selon lui. « Dans nos processus de participation publique classiques, c’est unidirectionnel. Tu me parles, je t’écoute », décrit-il. 

Avec le fonctionnement différent en ateliers de discussions et de jeux de rôle, M. Bourke est confiant que toutes les facettes du défi de la cohabitation sociale et de l’itinérance peuvent être saisies et que les recommandations finales n’en seront que meilleures. 

« Une des choses qu’on a pu retenir, c’est que l’activité [du 16 janvier] serait utile pour l’implantation de ressources », reconnaît-t-il. Ainsi, il entrevoit un changement du mode de fonctionnement des séances d’information traditionnelles précédant l’implantation de projets à impact public. 

« Autant le fonctionnement en atelier sert pour nos travaux, autant la commission pourrait suggérer dans son rapport que ce type de dispositif de participation publique soit mis en place pour favoriser la sensibilisation et une bonne compréhension des enjeux », affirme M. Bourke. 

Cependant, le président de l’OCPM admet aussi qu’il aurait souhaité voir un plus grand nombre de résidents et résidentes du Sud-Ouest qui n’oeuvrent pas auprès des personnes sans-abri. « Nos canaux de transmission rejoignent les gens qui s’intéressent très fortement à la consultation », analyse-t-il. 

Les groupes communautaires, qui suivent mais aussi diffusent l’information de l’OCPM, tendent à être bien plus présents. Il y avait également une forte présence de chercheurs et chercheuses universitaires. « On a un gros effort à faire pour rejoindre les jeunes et les personnes marginalisées », reconnaît-il.

Prochaine étapes pour la consultation publique

La rédaction du rapport de consultation devrait débuter à partir du 28 février. C’est la date limite pour soumettre une opinion, si l’on ne souhaite pas se présenter en personne devant les commissaires, lors des séances d’audition des opinions.

Le 18 janvier, l’OCPM fera un autre atelier de discussion au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui. Les échanges auront lieu après la présentation d’extraits de la pièce Viens-t’en dans rue. Son scénario porte sur les récits de vie des camelots et camelotes du magazine L’Itinéraire, qui collabore avec des personnes en situation d’itinérance. 

La consultation publique va aussi se poursuivre par une séance d’information et de questions-réponses le 21 janvier de 19h à 22h, au Centre St-Pierre, 1212 rue Panet, près de la station de métro Beaudry.

Cette séance sera également accessible par webdiffusion. La diffusion en direct sera visible au haut de la page de l’OCPM le jour même, quelques minutes avant la séance. Il sera possible de poser des questions à distance durant la séance, conformément aux directives affichées à l’écran.

Les images de l’article ont été prises le 16 janvier 2025 par Aziz Mestiri.